janvier 14, 2019

Jean-François Codère, La Presse

Autre mois de janvier, autre hiver d’inquiétude accrue pour les armateurs qui fréquentent le Saint-Laurent, qui craignent que la Garde côtière soit victime de bris de ses vétustes équipements et qu’elle ne soit plus en mesure d’assurer la circulation sur le fleuve.

« En ce moment, il n’y a pas de problème », concède Marc Gagnon, vice-président aux affaires gouvernementales de Fednav, le plus grand transporteur océanique de vrac au Canada.

« Et je précise qu’on n’a pas de problème avec les gens de la Garde côtière, qui connaissent leur métier et qui font ce qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont. Le problème est là, on ne pense pas qu’ils ont ce qu’il faut pour faire face à toutes les situations qui peuvent arriver. »

Il n’en faudrait pas beaucoup, selon plusieurs personnes interrogées, pour que la situation dégénère. Un ou deux bris, relativement fréquents sur une flotte qui date, à une exception près, de 40 ans et plus, quelques journées de grand froid…

« Pour l’instant, on est chanceux, mais on ne sait jamais comment ça peut virer. L’hiver a commencé tôt, mais il a été assez doux jusqu’à présent. Mais il suffit juste de quelques journées de froid. »

— Martin Fournier, directeur général des Armateurs du Saint-Laurent, un regroupement 

« Ce qu’on ne connaît pas, c’est quand le prochain brise-glace va briser, ajoute immédiatement Nicole Trépanier, présidente de la Société de développement économique du Saint-Laurent (SODES). Il y a un traversier qui a subi un bris sur la Côte-Nord et on en parlait tous les jours. Imaginez si le fleuve devait être fermé pendant un certain temps. »

Les dernières années ont été relativement fastes pour les ports du Saint-Laurent, à commencer par celui de Montréal, qui a inscrit en 2018 un cinquième record de suite. Mais tout est une question de confiance, rappelle Daniel Dagenais, vice-président aux opérations du port.

« Les armateurs, les clients, les importateurs sont tous au fait que les navires sont vieux et qu’il est déjà arrivé que certains d’entre eux manquent à l’appel. Ça emmène une réflexion à savoir si le Saint-Laurent est une destination fiable. »

« Si une ligne de conteneurs décide que ce n’est plus fiable d’aller à Montréal, ils vont aller ailleurs et ils ne reviendront plus », ajoute Marc Gagnon.

DES DÉCENNIES D’HÉSITATION

Voilà maintenant des années que le dossier des brise-glace traîne à Ottawa, rappelle Mme Trépanier.

« Moi, ça fait 20 ans que je suis dans le domaine maritime, et on parlait déjà du renouvellement de la flotte quand je suis arrivée. »

Politiquement, l’ajout de bateaux n’est pas particulièrement attrayant, convient-elle. À moins qu’ils ne soient construits au Canada. Mais ce n’est pas chose simple.

« Je ne m’oppose pas à ça, mais dans le cas présent, ça fait en sorte que les délais ont été allongés. »

— Nicole Trépanier, présidente de la Société de développement économique du Saint-Laurent (SODES)

Le premier nouveau brise-glace doit, si tout se déroule comme prévu, entrer en chantier en 2023 à Vancouver. Des plans précédents le voyaient entrer en service en 2017. Il ne sera vraisemblablement pas terminé avant 2027 et sera destiné à l’Arctique. Ce n’est qu’après que pourra s’amorcer la construction d’autres brise-glace destinés cette fois au Saint-Laurent.

Commander de nouveaux brise-glace à l’étranger coûterait moins cher et serait beaucoup plus rapide, rappelle Mme Trépanier.

« On veut des brise-glace, peu importe d’où ils viennent. On n’en est plus à l’étape de planifier pour les faire faire au Canada. »

La Garde côtière bénéficie depuis quelques semaines d’un nouvel appareil, acheté usagé de la Norvège. Ottawa en a acheté trois. Les deux autres devront, comme le premier l’a été, être mis à jour par le Chantier Davie. Le prochain devrait entrer en service dans un an, au mieux.

« Ce ne sont pas des brise-glace à l’état pur, rappelle toutefois M. Fournier. Ce sont des aides d’appoint. »

 

Source: http://plus.lapresse.ca/screens/6cf81a7e-661d-4b45-b20e-5c684ea5b58f__7C...

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